
Nom du blog :
coeurdhome
Description du blog :
Quand le destin pousse deux êtres à se retrouver au delà des frontières de la raison.
Catégorie :
Blog Littérature
Date de création :
07.04.2012
Dernière mise à jour :
02.12.2025
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bonjour. merci. j'adore ce que vous écrivez : votre style, la romance, la douleur, les paysages. j'ai vécue un
Par Nathalie, le 01.12.2025
DEUX ANS PLUS TARD
A perte de vue le sable étendait devant lui ses dunes jusqu'à l'horizon. Seules les tentes du bivouac rompaient l'isolement que la vue de cette étendue sans fin ne pouvait manquer de donner.
Le silence pesait sur lui encore plus que la chaleur à laquelle, depuis tant d'années maintenant, il était parvenu à s'habituer.
Les yeux plissés, les lèvres sèches, il regardait sans voir, et les seuls sons qui lui parvenaient étaient ceux de son coeur et celui du vent qui dans un souffle léger caressait le dos des dunes.
Tandis qu'au loin dans le ciel la lune éternellement suspendue diminuait d'intensité et que le soleil se levait dans son dos, il se souvenait d'un autre matin.
Celui où depuis, définitivement, tout dans sa vie a basculé.
Il avait fini par s'installer dans cette partie du sud marocain, s'éloignant un peu plus de ceux qui ici, sont devenus et sont restés ses amis. Il était presque parvenu à oublier, à moins se battre contre ses souvenirs, apprivoisant encore plus sévèrement son invisible cicatrice.
Il continuait ici de proposer son aide, apportant aux uns et aux autres, jeunes ou adultes, ce qui leur était nécessaire dans la mesure de ses moyens.
Aujourd'hui pourtant, la chaleur n'était pas la seule raison de sa bouche sèche, de sa gorge serrée.
Aujourd'hui, son coeur était empreint de tristesse. La nouvelle l'avait secoué, et avec elle une partie de sa vie s'effaçait.
Il était maintenant envahi par des souvenirs vieux de deux ans. Souvenirs qu'il pensait ne plus voir surgir même si la cicatrice qu'il portait au coeur n'était pas complètement parvenue à s’effacer.
TouS ces souvenirs étaient encore si vivants en lui, touS ces visages si proches dans son coeur.
La parenthèse de ces deux années passées loin d'eux comme il s'était décidé à le faire, lui avait permis de moins ressentir les manques, de moins subir ses sentiments interdits.
Il se demandait comment la famille de Bouchra était parvenue à connaître l'endroit où il s'était établi, comment aujourd'hui elle avait réussi à faire qu'il soit prévenu.
C'est comme si la porte d'une écluse venait de céder dans son coeur. Son passé redevenait présent. La fragilité de ses blessures intérieures se faisait sentir, menaçant de rompre à nouveau sous le flots d'un temps qu'il pensait avoir su oublier.
Mais à l'évidence, s’il avait jusqu'à maintenant pu l'enfouir sous le quotidien, celui-ci n'attendait qu'une occasion pour ressurgir.
Elle s'était présentée en la personne d'Ayoube, qui actuellement faisait le plein du véhicule après s'être restauré avant de reprendre le trajet du retour.
Mais, quelque soit la douleur qui remontait en lui, il ne pouvait pas faire autrement que d'accompagner Ayoub.
Après tout ce que Bouchra avait fait pour lui, il se devait d'être à ses côtés s’il n'était pas déjà trop tard. S’il le fallait, pour lui il serait même parti à pied. Mais le temps pressait et jouait contre eux si il avait bien saisi la gravité de ce qui lui était arrivé.
Ayoub l'air grave, lui faisait signe qu'il était prêt.
Une dernière fois Oustass regarde ce qui l'entoure, se lève et rejoint le 4X4 dont le moteur vient de se mettre en marche.
.
.
Depuis une heure qu'ils roulaient maintenant, seul le ronronnement du moteur avait troublé le silence qui s'était installé dans la voiture après l'échange de quelques banales paroles.
Oustass connaissait Ayoub, c'était un cousin de Bouchra, et il avait eu l'occasion de le fréquenter lorsque il était encore avec eux à M'hamid.
Il ne s'ennuyait pas dans ce voyage silencieux, non. Et depuis qu'il s'était laissé bercer par ce ronronnement, c'est dans le voyage de ses souvenirs qu'il s’égarait.
Dans sa nouvelle vie, cela arrivait quelques fois qu’ils se manifestent, mais il avait pris l'habitude de vite condamner la porte de son coeur lorsque cela se produisait, s’obligeant à se consacrer aux réalités du moment à qui il s'efforçait de donner plus d'importance.
Oui, il en avait pris des résolutions ; toutes plus difficiles les unes que les autres, toutes blessantes un peu plus à chaque fois à son coeur.
Et la plus importante d'entre elle avait été ce dernier soir, de convaincre Anna de retrouver sa vie en France.
Plus il avait argumenté ce qu'il lui imposait, et plus de chaque mot qu’il prononçait le mutilait comme des lames de rasoir, mais c'est à ce prix qu'il y est parvenu.
Bouchra était le dernier lien avec son passé, le dernier lien avec les souvenirs d’Anna.
Lorsque Bouchra quittera ce monde, il n'y aura plus rien de tout cela. Le vent effacera avec lui ce qui en existait encore.
Mais il l’espérait aujourd’hui avec inquiétude, Bouchera vivra encore longtemps.
- Ayoub, redis-moi comment est-ce arrivé. Dans l'émotion de la nouvelle je ne suis pas certain d'avoir tout retenu.
- Comme souvent Bouchra servait de guide aux touristes pour un bivouac dans les dunes.
Il était parti pour 48 heures avec deux couples : des gens de l'Europe de l'est.
Le troisième jour il n'était pas rentré, et nous ne pouvions le joindre il n'avait pas emporté de téléphone. Je suis allé sur place voir ce qu'il en était, et c'est là que je l'ai trouvé.
Les touristes étaient partis, et lui était sous la tente baignant dans son sang. Il vivait encore mais il était très faible.
Il a pu me dire qu'il a voulu protéger une femme de ces touristes lors d'une bagarre qui a éclaté entre les deux hommes. L'un deux a sorti un couteau et l'a volontairement frappé avec. Il avait trois blessures au ventre.
Si je n'étais pas arrivé, il serait mort là-bas, seul.
La première des chose qu'il m'a dit, est qu'il souhaitait que tu sois informé.
Il a perdu beaucoup de sang, trop a dit le marabout. Bouchra ne pourra pas survivre à ses blessures.
Dans le semi-coma dans lequel il a sombré, parfois il délire, et souvent il prononce ton nom.
Je l'ai ramené, puis Naïla m'a supplié d'aller à ta recherche. J'ai roulé toute la nuit. J'espère que nous n'arriverons pas trop tard.
Sans ajouter un mot, les mâchoires crispées Oustass de sa main serre l'épaule d'Ayoub dont la voix s'est étranglée sur ses derniers mots.
Oustass croit comprendre que Bouchra se meurt.
- Ayoub peux-tu me prêter ton téléphone ?
Oustass ne peut aider son ami mais il peut tenter de demander du secours.
Il connaît pour s'y être rendu à plusieurs reprises, la caravane médicale de l'aide sans frontière, dont le siège pour la région se situe à Zagora.
Mais au téléphone il n'a que le répondeur de cette organisation. Il laisse un message aussi complet que possible décrivant la situation de son ami et réclame une aide urgente.
Bouchra son ami qui lui avait permis de passer toutes ces épreuves. Lui qui s'était même inquiété de rendre possible la présence d’Anna avant qu'il ne les quitte définitivement.
Oustass bercé par la route et la régularité du moteur s'est enfoncé un peu plus dans le siège de la voiture.
A la pensée de Anna il ne peut s'empêcher d'être débordé par ses émotions.
Le destin se joue de lui, il était presque parvenu à moins ressentir les effets de son absence, à moins subir le feu de la blessure d'avoir voulu volontairement s'éloigner en lui laissant croire que c'est ce qu'il voulait.
.
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Le trajet s'était déroulé sans incident, et dans le silence qui sied aux hommes qui ont pour habitude d'affronter la rudesse du climat, la traversée des zones désertiques de ce continent, Ayoub et Oustass avaient échangé peu de mots.
Oustass généralement était avare de dialogue. Depuis l'enfance il avait appris à ne dire que ce qui lui semblait nécessaire, et il ne savait ni m'aimait parler pour parler. Il préférait de loin ces moments de silence où ses pensées et son âme, intimement liées, s'évadaient en parcourant le monde, les arcanes de la vie, ou simplement tapies au fond de lui même, observaient comme sur les rives d'un fleuve, s'écouler autour de lui les instants de la vie.
Ils arrivaient au bout du voyage.
Oustass avait souhaité qu'Ayoub le dépose à l'entré du village qu'il traversait maintenant à pieds, pour rejoindre la maison de son ami.
La première remarque que se fait Oustass, c'est le calme qui règne dans ces ruelles habituellement si bruyantes de l'activité journalière, et des cris des enfants qui jouent. Les rares passants qu'ils croisent sont silencieux, le regard bas.
Certains le reconnaissent et le saluent de la tête. D'autres viennent luis serrer la main, les yeux implorants, chargés d'une lueur d'espoir que leur donne son retour.
Oustass ressent la peine de ces hommes, de ces femmes. L'espoir qu'il devine en eux, lui donne maintenant la culpabilité d'être présent ; que pourrait-il faire de plus, il n'est pas médecin et les secours sont si loin.
La vie est ainsi dans cette partie du monde comme dans tant d'autres.
Un groupe d'hommes est assis devant la maison de Bouchra. Encore cent mètres et il en passera la porte.
Ilss se lèvent en le voyant arriver. Ils connaissent la vie d'Oustass et de Bouchra.
On s'écarte pour lui laisser le passage libre.
Oustass avance sous ces regards qui lui transmettent leur émotion. Il ralentit l'allure.
Puis soudainement Naïla surgit. Elle vient d'être informée de son arrivée, s'arrête sur le pas de la porte, puis se précipite jusqu'à lui pour se jeter contre sa poitrine et l'enserrer dans ses bras.
Sans relever la tête dans un murmure elle lui dit :
- Oh Oustass... Tu es là, enfin !.... Je pensais qu'il ne te trouverait pas ou que tu ne serais pas arrivé à temps...
Oustass lui prend le menton, relève son visage aux yeux larmoyants, et lui pose un baiser sur le front. Naïla lui prend la main et le guide jusqu'à son père.
Bouchra est étendu sur son lit. Oustass constate immédiatement la couleur craie de sa peau. Il semble dormir, sa poitrine se soulève à peine sous l'effet de la faible respiration.
Dans la pièce il reconnaît le marabout à son turban vert. Un autre homme est là, ainsi que l'épouse de Bouchra. Il les salue, embrasse la femme, puis il prend une main de Bouchra, se penche et lui chuchote à l'oreille :
- Je suis là mon ami. Je vais prendre soin de toi, reviens-nous vite.
Un moment après il se retrouve dehors avec le marabout qui lui explique.
- Ses blessures, bien que délicates ne sont pas extrêmement graves. Mais il a perdu trop de sang. Il ne s'en remettra pas, il s'affaiblit d'heure en heure, je ne lui donne pas plus de deux jours avant la fin.
Oustass le remercie de sa franchise et reste à l'extérieur, le coeur serré. Il marche un moment, pensif et tourmenté.
La mort de Bouchra lui semble impensable. Mais il doit se rendre à l'évidence. Il n'est pas médecin et celui à qui ce rôle est ici attribué, il sait pouvoir lui faire confiance, est affirmatif sur l'issue à venir.
Oustass de plus, sait intimement que d'une certaine manière, avec la mort de Bouchra c'est aussi Anna qu'il perd définitivement.
En cet instant il s'en veut un peu de penser à lui, de penser à elle, mais tous ces évènements passés sont si intimement liés à Bouchra...
Il veut encore tenter de l'aider, il ne peut pas le regarder s'éteindre comme cela, sans rien faire.
Il se demande aussi si sa motivation n'est pas en même temps de sauver ce qui lui reste d'elle.
Il retrouve Ayoube, emprunte une fois encore son téléphone, tente d'avoir quelqu'un de la caravane médicale.
Mais Oustass s'énerve après plusieurs tentatives. Seul le répondeur a pu enregistrer ses demandes d'aide.
Finalement il retourne voir le marabout.
Lorsque dans la chambre il l'interroge, Naïla toujours présente glisse sa main dans la sienne. Il ne la rejette pas, au contraire il la prend avec douceur.
Et le marabout lui répond.
- Non aucun moyen de le sauver, Allah le rappel à lui.
- Mais vous m'avez dit que le manque de sang était ce qui le menait à la mort ?
- Oui, et nous n'avons pas ici d'endroit assez proche pour obtenir du sang que l'on pourrait lui transfuser. Et je crois qu'il est maintenant trop tard pour cela.
- Il faut essayer !... Avez vous ici de quoi transfuser du sang ?
- Non pas ici, et même si nous avions ce matériel à quoi nous servirait-il ?
- Ecoutez, mon rhésus est donneur universel. Si vous trouvez rapidement les moyens matériels, c'est mon sang qu'il recevra.
.
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- Tu avais perdu l'envie de rire ? lui demande malicieusement Naïla.
- Non, bien sûr que non. Au contraire, c'est dans le rire et mes folies parfois, que je parviens à compenser. Mais le côté jeu est spontané comme celui que nous venons de créer, je l'avais un peu oublié.
- Je t'ai vu souvent rire et t'amuser avec Anna. Vous étiez radieux l'un près de l'autre. Je l'ai souvent enviée.
- Mais toi aussi tu es radieuse, et tu restes la plus belle jeune femme que j'ai eu à rencontrer tout au long de ma route.
Naïla sent son coeur se serrer, elle rougit un peu. Il y a autre chose qu'elle ne lui a jamais dit encore.
Il regarde Naïla. Il lui semble qu'elle est encore plus belle que dans son souvenir.
Mais plus il la regarde plus il pense à Anna.
Naïla qui dans le ruissellement du fleuve s'est jetée sur lui et se retrouve maintenant allongée sur son torse.
Oustass surpris par ce geste rigole et se dégage de son emprise :
Naïla, espiègle jeune fille, aurais-tu chaud au point de perdre la tête ?
Je suis si heureuse de te revoir. J'ai moi aussi si souvent pensé à toi.
Oustass se relève, lui tend la main et l'aide aussi à se relever. Il ne peut ignorer les formes du corps de Naïla que dévoilent ses habits mouillés.
Bien sûr, son propre corps réagit à cette vision, mais il veut l'ignorer et détourne le regard de ces appas tentateurs.
Naïla qui comprend la situation lui sourit et lui demande :
- Y a-t'il longtemps que tu n'as pas été en compagnie d'une femme ?
- Ne te méprends pas Naïla. Des femmes traversent ma vie, je les laisse passer, et si parfois quelques-unes s'attardent la nuit, aucune n'a pu effacer l'empreinte de celle qui a envahi mon coeur.
Naïla est un peu touchée par cette réponse, mais elle se dit qu'elle l'a mérité, et passe à autre chose.
- Viens rentrons à la maison il y fera plus frais, et j'ai quelque chose à te montrer.
Oustass n'a cette fois encore pas refusé la main qu'elle venait de glisser dans la sienne. Ceux qui les auraient aperçus pouvaient penser voir des amoureux, souriants et gais de se retrouver.
Pourtant si Naïla pouvait être euphorique de cette journée imprévue avec Oustass et par l'imaginaire qu’elle se faisait de la nuit à venir, lui, souriait simplement de penser qu'il allait à son tour, peut-être, pouvoir sauver son ami sans se soucier du lendemain de sa vie.
En arrivant dans la maison de Naïla, Oustas a la surprise de retrouver Ayoub. Il tenait deux jeunes enfants dans les bras.
- Oustass j'ai le plaisir de te présenter Ayoub, mon époux que tu connais maintenant, et mes deux enfants, des jumeaux, Brahim et Fanie.
Oustass reste un instant sans voix. Jamais il n'aurait imaginé que Naïla puisse déjà être maman.
- Ils ont deux ans, enchaîne Naïla. Ce soir comme le marabout souhaite que tu dormes chez moi,
Ayoub et les enfants seront chez ma belle famille.
- Vous avez de très beaux enfants. Des jumeaux c'est en plus très rare par chez vous. Cela a dû être une belle fête que l'arrivée de ces deux bambins.
Alors qu'Ayoub s'éloigne et quitte la maison les enfants dans les bras, Oustass se dit que ces enfants se ressemblent vraiment comme des jumeaux, et il lui semble aussi en les regardant, reconnaître quelqu'un, mais il ne parvient pas à savoir qui.
- Naïla, tes enfants me font penser à quelqu'un que je connais, mais je n'arrive pas encore à définir qui.
Naïla dont le coeur s'accélère sent qu'elle rougit, se détourne du regard d'Oustass.
- Asseois toi. Le marabout te recommande du repos, je vais aller te chercher des habits propres.
Naïla pense encore à ce que lui a dit le marabout, « C'est de la folie d'accepter la demande d'Oustass, mais c'est aussi la seule solution que nous avons pour tenter de sauver Bouchra ».
- Que veux tu dire par de la folie ? lui avait t-elle demandé.
- Si tout va bien nous pourrons peut-être sauver ton père. Mais s’il est trop faible, nous perdrons les deux hommes… Essaye de faire revenir Oustass sur sa décision. Il est généreux, mais il court à sa perte.
- Et comment veux-tu que je parvienne à le faire changer d'avis ?
- Dis lui pour tes enfants...
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.
Oustass seul dans sa pièce se laissait emporter par ses pensées. Anna ne lui avait plus donné de nouvelle, et au fond de lui, il avait toujours espéré en recevoir un jour.
Anna...
Il en était persuadé, elle n'avait jamais du réaliser comment il avait forcé un temps soit peu, l'image qu'il pouvait donner, pour la pousser à finalement accepter d'elle-même cette décision de s'éloigner de lui. Et elle était partie. Le laissant là sans plus jamais donner signe de vie.
Combien de fois durant ces années passées avait-il hésité à retourner la voire en France ?
Combien de fois avait-il jouté contre son coeur pour qu'en fin elle parvienne à trouver la paix du sien ?
La paix de son coeur, et la stabilité dans sa vie. Oui, il avait fait en sorte qu'elle y parvienne.
Mais c'était autant de fois où, de force, il lacérait ce coeur qui la réclamait et la cherchait encore.
Autant de fois où il réalisait qu'il manquait maintenant à sa vie une part de lui même.
Oui, il espérait vraiment pouvoir sauver Bouchra.
- Tiens voilà ! Père serait fier de savoir que tu portes une fois de plus ses habits.
Naïla dépose devant lui les vêtements qu'elle a ramenés, s'agenouille et lui sert une tasse de thé.
- Oustass, si tu savais comme tu m'as manqué. J'ai d'abord été malheureuse pour vous deux lorsque que je vous ai vu vous dire adieu, vraiment. Puis c'est moi qui soudainement ai ressenti le manque de ta présence.
Je ne te voyais pas souvent, mais les quelques fois où je pouvais percevoir le son de ta voix, un peu de ton odeur, ou simplement te regarder passer, suffisait à combler mes jours en attendant le suivant qui te ramènerait momentanément là.
Tu as toujours eu pour moi comme pour les autres, un mot gentil, un sourire. Je les ai tous gardés en images souvenirs, là.
Et elle pose la main sur son coeur.
Oustass ne réponds pas. Il avait fini par deviner et était conscient de l'emprise qu'il avait sur Naïla. Et le regard lointain, il sirote son thé tout en caressant les cheveux de celle qui lui fait ses aveux.
Des aveux qui ne le touchent pourtant pas. Ces mots, s’il n'avait pas été assez fort pour l'éloigner, il sait qu'un jour il les aurait prononcés à l'égard d’Anna.
- Oui, j'attendais ton retour, et remerciais Allah de te faire passer par ici lorsque c'était le cas. Et tu es là. Pourtant aujourd'hui mon coeur est triste. Je préférerais que tu sois encore loin.
Le marabout m'a dit... Je sais que tu es prêt au sacrifice de ta vie pour celle de Bouchra...
Bouchra est mon père, et je lui doit la vie. Toi tu es l'ami de mon père et je te dois d'avoir connu l'amour. Je prie Allah chaque instant pour qu'il vous protège tous les deux demain, et qu'il couronne de succès ce que tu vas entreprendre.
- Ne crains rien adorable Naïla. Qu'as tu à t'enticher d'un vieux bonhomme comme moi qui pourrait aussi être ton père.
- Tu ne sais pas tout Oustass, - Naïla se mord les lèvres pour ne pas en dire trop - tu es plus que mon père.
Oustass est parti se doucher. Naïla est tentée de renouveler son insolente intrusion pour le rejoindre, mais elle se dit que les circonstances ne l'autorisent pas.
Elle préfère attendre la complicité de la nuit pour retrouver plus intimement l'homme qui fait battre son cœur, et son coeur s'emballe encore un peu lorsqu'elle voit Oustass arriver torse nu, portant juste son sarouel, une serviette sur la tête frottant énergiquement ses cheveux courts.
Oustass lui sourit et la remercie une fois encore de cette hospitalité.
- Tu es ici chez toi, et je te dois plus que cela...
- Naïla j'aurai besoin de papier et de quoi écrire, j'ai deux lettres à rédiger.
- Maintenant ? Cela ne peut pas attendre que tout cela soit fini ?
- Maintenant oui, justement. Je préfère prévoir.
- Tu ne m'en voudras pas d'être curieuse ?
- Bien sûr que non !
- A qui d'aussi important veux-tu écrire sans que cela puisse attendre ?
- Je veux laisser un mot à Bouchra, on ne sait jamais, et je ne veux pas qu'il puisse avoir de regrets. Puis coucher mes derniers mots pour Anna. Qui sait, un jour peut-être passera t-elle par là. Tu pourras lui remettre et lui raconter.
Naïla s'était doutée de cette réponse. La jalousie la pince un peu, mais au-delà, c'est ce qu'implique dans ses mots, l'état d'esprit d'Oustass qui l'inquiète le plus.
On frappe à la porte d'entrée, doucement mais fermement. Naïla ouvre, le marabout l'air grave se tient devant la porte.
- Dis à Oustass de me rejoindre chez ton père, nous n'avons plus le temps d'attendre, son état s'aggrave, il est urgent d'agir.
Naïla sent son ventre se tordre et ses yeux s'embuer. Cette impression de mauvais pressentiment la saisit de nouveau.
Oustass s'est levé alors que Naïla revient vers lui.
- Tiens j'ai trouvé de quoi te permettre d'écrire.
Il regarde son visage tendu par la crainte. Il lui prend la main, l'attire à lui et l'enserre entre ses bras.
Naïla se presse encore plus contre lui, sa tête lovée sur son épaule.
- Oustass, tu as encore le droit de réfléchir, il n'est pas trop tard.
- Allons Naïla...Ne crains rien, tout se passera bien. Crois-tu que je puisse venir ici juste pour regarder ton père doucement nous quitter sans que je ne tente rien pour celui qui a tant fait pour moi ?
Tant pis pour ces lettres, après tout elles ne serviraient certainement à rien et demain tout cela ne sera qu'un joyeux souvenir. Regarde-moi.
Alors que dans un geste habituel de sa main il prend son menton et lui relève la tête, Naïla lève les yeux et le regarde.
Il à l'air radieux, il lui sourit rassurant, se penche vers elle et pose ses lèvres sur sa bouche en un tendre baiser.
Il sent son parfum, la douceur de sa peau, et sa bouche qu'elle entrouvre laisse passer la pointe d'une langue qui vient fureter entre ses lèvres. Oustass a une violente envie de lui faire l'amour, et Naïla qui ne peut manquer de remarquer la raideur qui pousse contre son ventre qu'elle tient serrer contre le sien, se presse encore plus et l'embrasse maintenant goulûment.
Sans cesser son baiser elle pousse Oustass contre le mur, et entame une danse du ventre qui parcoure toute la raideur du sexe tendu de désire.
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